Immobilier : les passoires thermiques bousculent le marché
Une étude publiée ce 1 er février de SeLoger et d'Opinionway analyse l'impact des obligations de rénovation énergétique des passoires thermiques sur le marché immobilier. Prix, loyers, nombre de biens en vente ou à louer, en passant par l'état d'esprit des Français face à cette actualité, sont passés au crible.
Enclenché depuis des mois, le verdissement du parc immobilier résidentiel tricolore s'annonce comme un virage de plus en plus incontournable . Une première salve d'obligations de mise en conformité des logements, en vertu de la loi climat et résilience de 2021, a été lancée l'année dernière .
Ainsi, les propriétaires des passoires thermiques, ces logements particulièrement énergivores et étiquetés F et G dans le diagnostic de performance énergétique (DPE), n'ont plus le droit d'augmenter leur loyer.
Une étape supplémentaire a été franchie depuis le 1er janvier, selon laquelle il n'est plus possible de proposer à la location en France des logements classés G et consommant plus de 450 kWh par mètre carré et par an. Cette interdiction ne concerne que les nouveaux baux, pas ceux en cours. Elle sera progressivement étendue à l'ensemble des biens classés G en 2025, aux F en 2028 et E en 2034.
Dans ce contexte de transition éco-compatible à marche forcée de l'immobilier, le groupe SeLoger a souhaité prendre la mesure de l'impact de ces nouvelles réglementations sur le marché. L'enquête se fonde à la fois sur les annonces publiées sur le site de SeLoger, sur les transactions des agences partenaires de Meilleurs Agents ainsi que sur un sondage réalisé par OpinionWay auprès des Français *. Zoom sur les 3 principaux enseignements.
1. Davantage de mises en vente
Le phénomène a déjà été pointé dans des études précédentes notamment par la Fnaim en septembre dernier . La nouvelle enquête de SeLoger le confirme : les mises en vente de passoires thermiques augmentent de façon significative depuis 2021. Ainsi, ces biens énergivores représentent aujourd'hui 19,2 % de l'ensemble des logements mis en vente sur SeLoger alors qu'ils ne pesaient que 11,2 % en 2020.
Sur le plan géographique, la tendance est plus prononcée à Paris, notent les auteurs de l'étude, dans un marché toujours baissier en janvier et en suroffre de biens disponibles à la vente. Les passoires thermiques mises en vente dans la capitale sont 4 fois plus nombreuses qu'en juillet 2021 et représentent 37 % des biens en vente actuellement.
En comparaison, à Marseille, où les prix immobiliers continuent de grimper depuis un mois, « tout semble se vendre, même les biens les plus mal notés par le DPE. Les passoires thermiques n'y pèsent que 4 % du stock total des biens en vente.
« Derrière cette hausse se cachent plusieurs réalités, nuance Thomas Lefebvre, directeur scientifique de SeLoger. Le nouveau mode de calcul et l'obligation de renseigner la classe DPE dans les annonces de biens en vente ont contribué à cette hausse. » Selon SeLoger, le DPE est désormais renseigné dans 83 % des annonces publiées sur son site, où il est d'ailleurs devenu un nouveau critère de recherche à part entière.
A noter aussi que les projets de vente impactés par un mauvais DPE ne concernent pas uniquement les bailleurs visés par la loi mais aussi les propriétaires de résidence principale - 31 % des vendeurs dans ce cas ont décidé de vendre en raison d'un mauvais DPE - et plus fortement encore ceux de résidences secondaires (50 % d'entre eux).
En cause, avance le directeur scientifique « les craintes que peuvent représenter de tels logements en termes de coûts et de temps de rénovation, par l'importance du coût énergétique dans un contexte inflationniste et par une éventuelle anticipation de perte de valeur du bien par les propriétaires. »
2. Des bailleurs jettent l'éponge
Face au poids des obligations de rénovation énergiques sur les épaules des propriétaires bailleurs, des professionnels alertent sur le risque d'attrition du parc locatif privé. L'enquête SeLoger confirme « une tendance plus marquée ces 6 derniers mois d'une baisse nette de l'offre locative de passoires thermiques, qui concorde avec le calendrier législatif. »
Un certain nombre de propriétaires bailleurs auraient décidé de vendre leurs biens classés F ou G plutôt que de réaliser des travaux de rénovation pour continuer à les louer.
Mais, tempèrent là aussi les auteurs de l'étude, le recul de l'offre locative constatée depuis l'été 2022 concerne aussi les biens qui ne sont pas classés dans la catégorie passoires.
La baisse de l'offre pourrait aussi s'expliquer par la remontée des taux d'intérêt , qui freine les projets d'achats et pousse les locataires à rester là où ils sont, ralentissant d'autant la rotation du parc.
3. Des décotes marquées
Source de tracas pour les uns qui ne pensent qu'à s'en débarrasser, les passoires thermiques peuvent-elles être source d'opportunités ? Oui, si l'on se place du seul point de vue de la valorisation.
D'après le sondage, 90 % des futurs acquéreurs déclarent ne visiter que les biens ayant un bon DPE ou considèrent un mauvais DPE comme un argument de négociation . En parallèle, les futurs vendeurs se disent prêts à baisser leur prix à cause du DPE de leur bien : 79 % pour les vendeurs de résidence principale et 57 % pour les vendeurs d'investissement locatif.
La pratique semble leur donner raison. L'étude révèle que les passoires sont proposées à la vente, en moyenne, 3,9 % moins cher qu'un bien équivalent non passoire. De plus, elles sont davantage négociées que les autres biens : près de 70 % des appartements classés F ou G sont négociés dans les 10 plus grandes villes (hors Paris), contre 61 % pour les biens des classes supérieures (De A à E dans le DPE). Cette négociation est aussi plus agressive pour ces logements avec une marge de négociation de - 5,6 %, en moyenne, en France contre -3,7 % pour les biens mieux notés.
Par conséquent, conclue l'étude, il y a une différence significative sur l'évolution des prix selon qu'il s'agit ou non de passoires. En France, leur prix ont crû, en moyenne, de 3,7 % depuis juillet 2021. C'est près de deux fois moins que pour les autres logements (+ 7 %). « Cette tendance baissière devrait s'accélérer en France », estime Thomas Lefebvre.
VIDEO. Où en est le marché de l'immobilier en France ?
Source : Les Echos
Par Anne-Sophie VionPar Anne-Sophie Vion
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